Quand il était petit, mon frère avait une collection très originale : une collection de collections.
Il y avait les timbres, papillons de papier coloré, rectangles voyageurs stampés d'encre effacée, bien rangés sous une bande de plastique rigide, bien plaqués sur le canson noir d'albums alignés sur l'étagère.
Il y avait les pin's, rondelles métalliques à l'attache indétachable, qui trouait le tissu et rouillait en larmes brunes, en vrac dans une boite en plastique qui avait dû, dans une autre vie de salle de bain, contenir des cotons-tiges.
Il y avait les insectes, trouvés au jardin, sèches sauterelles aux pattes fuselées, grasses mouches strassées de glauques saphirs et de troubles émeraudes , araignées rétrécies aux pattes repliées dans la mort, tous et toutes ailes et pattes épinglés sur la plaque de polystyrène qui jaunissait.
Il y avait les cartes téléphoniques, rectangles froids et mats, messages publicitaires, nombre d'unités, une pile de plastique qui sentait la cabine, odeur métallique d'urine et d'haleine de toutes les conversations échangées.
Il y avait les bouteilles de coca-cola, toutes les langues, toutes les tailles, fer et verre, camaïeu de rouge plus ou moins fané, la mondialisation en action jusqu'à la petite voiture de métal à la tôle faite de canettes recyclées.
Il y avait la tablette aux horreurs, cadavres momifiés de souris, cadavres écrasés de grenouilles imprudentes sur la route, longuement séchées au soleil du macadam, os de rongeurs dégagés à la pince des pelotes de déjections des oiseaux de la nuit aux plumes fines et d'autres macabres trophées posés sur le pin blanc.
Il y eu sans doute aussi la collection d'escargots vivants dans la boite à chaussures, de têtards du printemps qui ne devinrent jamais grenouilles en été, de coquillages des plages bretonnes qui fleuraient la marée, de chapeaux du monde entier, tant et tant de collections qui furent un jour montées au grenier puis jetées quand la maison fut vendue.
Depuis trois ans, je collectionne à mon tour de drôles d'objets, des diplômes archaïques sur des parchemins signés à l'encre par des présidents d'université en toge, des articles scientifiques qui finiront au grenier, des auditions avortées avant l'été, des espoirs fanés exposés comme des monstres, des postdocs strassés de vide qui comble les projets de l'ANR
Hier, j'ai repris le chemin familier de la poste, pour compléter ma collection de numéros de qualification, j'en ai déjà deux, un par année de candidature. Jamais deux sans trois, j'ai ressorti mon dossier à convaincre, l'ai un peu toiletté pour la section nouvelle et l'ai imprimé en deux exemplaires qui partiront vers le Sud qui chante et l'Est qui neige. Hier j'ai recommencé un dossier CNRS à ajouter aux autres cadavres de dossiers de ma collec'. Hier j'ai ajouté un article à grenier à mon Curriculum Vitae, cette monstrueuse collection de collections qu'on jettera peut-être quand la maison sera vendue.
Il y avait les timbres, papillons de papier coloré, rectangles voyageurs stampés d'encre effacée, bien rangés sous une bande de plastique rigide, bien plaqués sur le canson noir d'albums alignés sur l'étagère.
Il y avait les pin's, rondelles métalliques à l'attache indétachable, qui trouait le tissu et rouillait en larmes brunes, en vrac dans une boite en plastique qui avait dû, dans une autre vie de salle de bain, contenir des cotons-tiges.
Il y avait les insectes, trouvés au jardin, sèches sauterelles aux pattes fuselées, grasses mouches strassées de glauques saphirs et de troubles émeraudes , araignées rétrécies aux pattes repliées dans la mort, tous et toutes ailes et pattes épinglés sur la plaque de polystyrène qui jaunissait.
Il y avait les cartes téléphoniques, rectangles froids et mats, messages publicitaires, nombre d'unités, une pile de plastique qui sentait la cabine, odeur métallique d'urine et d'haleine de toutes les conversations échangées.
Il y avait les bouteilles de coca-cola, toutes les langues, toutes les tailles, fer et verre, camaïeu de rouge plus ou moins fané, la mondialisation en action jusqu'à la petite voiture de métal à la tôle faite de canettes recyclées.
Il y avait la tablette aux horreurs, cadavres momifiés de souris, cadavres écrasés de grenouilles imprudentes sur la route, longuement séchées au soleil du macadam, os de rongeurs dégagés à la pince des pelotes de déjections des oiseaux de la nuit aux plumes fines et d'autres macabres trophées posés sur le pin blanc.
Il y eu sans doute aussi la collection d'escargots vivants dans la boite à chaussures, de têtards du printemps qui ne devinrent jamais grenouilles en été, de coquillages des plages bretonnes qui fleuraient la marée, de chapeaux du monde entier, tant et tant de collections qui furent un jour montées au grenier puis jetées quand la maison fut vendue.
Depuis trois ans, je collectionne à mon tour de drôles d'objets, des diplômes archaïques sur des parchemins signés à l'encre par des présidents d'université en toge, des articles scientifiques qui finiront au grenier, des auditions avortées avant l'été, des espoirs fanés exposés comme des monstres, des postdocs strassés de vide qui comble les projets de l'ANR
Hier, j'ai repris le chemin familier de la poste, pour compléter ma collection de numéros de qualification, j'en ai déjà deux, un par année de candidature. Jamais deux sans trois, j'ai ressorti mon dossier à convaincre, l'ai un peu toiletté pour la section nouvelle et l'ai imprimé en deux exemplaires qui partiront vers le Sud qui chante et l'Est qui neige. Hier j'ai recommencé un dossier CNRS à ajouter aux autres cadavres de dossiers de ma collec'. Hier j'ai ajouté un article à grenier à mon Curriculum Vitae, cette monstrueuse collection de collections qu'on jettera peut-être quand la maison sera vendue.
5 commentaires:
Bonjour Pandore, j'avoue que je ne comprend pas pourquoi tu refaits un dossier de qualification tous les ans. Normalement celle ci est valable quatre ans. En tout cas bon courage. Je pense que c'est la seule chose à dire.
Parce que justement je fais la collec' ;) Une sorte de Bingo Universitaire où il faudrait tous les numéros :D
Plusieurs disciplines = plus de postes potentiellement accessibles. Même si dans les faits, une qualification te suffit pour postuler dans toutes les disciplines, la qualification dans la section officielle du poste est plus que conseillée pour postuler.
Sinon je confirme : une qualification est valable 4 ans, ensuite il faut recommencer... si on en a encore le courage....
http://www.libfly.com/public/images_t/563/9782020813563_1_75.jpg
"Il faut collectionner les pierres qu'on vous jette. C'est le début d'un piédestal." (Berlioz)
(merci Google)
et bon courage
Merci à toi pour ce regard décalé et plein d'humour sur une dure réalité universitaire. Je ne saurais que te dire "Bon courage" et "Bonne chance" pour cette nouvelle collection. Tu as du courage et de la motivation, je n'en ai pas eu de même et ait préféré mettre le cap à l'ouest !
Garde ton esprit acerbe qui me fait sourire à chacun de tes articles !
Solidarité, j'ai fait exactement la même chose que toi en décembre. une demande de qualificiation dans une seconde section, une candidature CNRS, et commencé la rédaction d'un nouvel article... en revanche cette année je me suis inscrit en Master 2 pro, et je suis en stage pro !! ainsi, je serai bac +9 avec 3 ans de postdoc aux USA. Une autre nouveauté, je suis aussi payé par les assedics. de retour de postdoc je n'ai trouvé personne à l'aéroport, j'ai subi une campagne de recrutement humiliante durant laquelle mon dossier n'a été retenu que 3 fois bien que je ne corresponde pas aux profils (comme il me l'a été dit le jour des auditions).
Mais je suis ravi car tout le monde m'a dit que j'avais un très bon dossier :))
Enregistrer un commentaire